Il y a 50 ans jour pour, le général Mobutu arrivait par un coup d’Etat, à la tête de la République démocratique du Congo (RDC), où il règnera pendant près de 32 ans, jusqu’en 1997. Que reste-t-il de son bilan économique ?
Après sa prise effective de pouvoir en 1965, le général Mobutu demande cinq ans pour remettre le Congo sur ses pieds. Promesse tenue pour l’unification de l’immense pays de plus de 2,3 millions de km², mais ses engagements de développement n’ont pas dépassé le stade des simples promesses.
« Avant son arrivée au pouvoir, le Congo était dans une situation comparable à celle qu’on connaît aujourd’hui. Le Congo de l’époque, entre 1960 et 1965, avait vécu des guerres civiles, des rébellions, des sécessions. Et au moment où Mobutu a pris le pouvoir, il a était accueilli chaleureusement par tout le monde, les Congolais et la communauté internationale », relate Filip Reyntjens, professeur à l’Institut de politique et de gestion du développement à l’université d’Anvers (Belgique) et spécialiste de la zone des Grands Lacs. Dans un premier temps, entre 1965 et 1975, Mobutu avait d’une certaine manière remis le pays sur les rails. »
A la tête d’un pays au sous-sol très riche, Mobutu a lancé des projets pharaoniques, parfois des éléphants blancs, qui ont permis des détournements à tous les étages. En 1973, il décrète une mesure appelée « zaïrianisation ». « Toutes les entreprises ont été reprises par des nationaux zaïrois et je crois que c’est là qu’il faut situer le début de la disparition en partie de l’Etat congolais », estime Filip Reyntjens.
« Mobutu a carrément détruit l’Etat par des politiques de prédation, de clientélisme, d’utilisation de moyens publics à des fins privées, etc. Et ce qu’on observe encore aujourd’hui et en particulier à l’est du Congo, c’est l’impossibilité pour l’Etat de contrôler son territoire national», ajoute le professeur belge.
Ouverte en 1974, l’usine sidérurgique de Maluku est une illustration parmi d’autres de ces chantiers inachevés par le pouvoir. Elle n’a fonctionné que pendant cinq ans et à 10 % de sa capacité. Après plusieurs tentatives de relance sans succès, elle est en réhabilitation depuis 2012. Autre exemple emblématique, le barrage d’Inga, qui peut fournir de l’électricité à une grande partie du continent, n’est encore exploité aujourd’hui qu’à moins de 10 % de son potentiel au moment où les Congolais souffrent toujours de pénurie d’énergie.
Sous le régime de Mobutu, l’économie du pays est restée marquée par l’extraction et l’exportation des minerais, sans aucune valeur ajoutée. Bref, après des débuts prometteurs, le général a laissé un pays croulant sous le poids de la dette et où des secteurs comme l’agriculture, l’éducation ou la santé étaient dégradés.
Mais Mobutu, c’est aussi la mystification d’une authenticité et d’un nationalisme africains triomphants. « S’il a un mérite, alors qu’il a détruit l’Etat, il a dans une large mesure construit la nation zaïroise ou congolaise. Le sentiment d’être congolais ou zaïrois sous Mobutu a été une politique menée avec un certain succès », concède Filip Reyntjens.