Le procureur du tribunal spécial africain qui juge l’ex-président tchadien Hissène Habré à Dakar, a plaidé mercredi, pour sa condamnation pour crimes contre l’humanité, en tant que « véritable chef de service » de l’appareil de répression tchadien sous son régime (1982-1990).
Au cours d’un réquisitoire de plusieurs heures, le procureur spécial, Mbacké Fall, a demandé au tribunal « d’entrer en voie de condamnation » pour plusieurs des chefs d’accusation les plus graves, dont crimes contre l’humanité, crimes de guerre et viol, sans préciser dans l’immédiat la peine requise.
« La machine répressive s’est mise en marche sous la haute direction de Hissène Habré qui en était le véritable chef de service », a affirmé le procureur.
« La DDS (Direction de la documentation et de la sécurité, police politique du régime, NDLR) est directement subordonnée à la présidence en raison du caractère confidentiel de ses activités, a-t-il souligné, la qualifiant d’ « oeil et oreille du président ».
« Hissène Habré a créé ses propres prisons, qui n’ont rien à voir avec le système carcéral officiel. C’est dans ces mouroirs que les violations des droits de l’Homme ont été les plus massives », a poursuivi M. Fall, dénonçant des « centres, pas de détention, mais de concentration ».
Ce procès inédit – le premier au monde dans lequel un ancien chef d’Etat africain est traduit devant une juridiction d’un autre pays pour violations présumées des droits de l’homme -, a été ajourné depuis après l’audition des témoins le 15 décembre, pour reprendre ce lundi avec les plaidoiries.
A l’instar des précédentes audiences tenues depuis l’ouverture du procès le 20 juillet 2015, l’unique accusé, vêtu d’un boubou et d’un turban blancs, le regard caché par des lunettes noires, est resté silencieux et impassible, après avoir été accueilli par les vivats de ses partisans à son arrivée au tribunal.
Il comparaît devant les Chambres africaines extraordinaires (CAE), juridiction créée en vertu d’un accord entre le Sénégal et l’Union africaine (UA), qu’il récuse et devant laquelle il refuse de s’exprimer et de se défendre, une tâche confiée par les CAE à trois avocats commis d’office.