Amnesty International a dressé un bilan sévère des atteintes à la liberté d’expression en Côte d’Ivoire, dans un rapport publié ce lundi.
«Sept ans après la crise postélectorale, qui a coûté la vie à 3.000 personnes, la Côte d’Ivoire projette une image de relative stabilité favorisée par une (forte) croissance économique et par un retour sur la scène internationale». Mais «la situation en matière de droits humains demeure fragile», à moins de deux ans de la prochaine élection présidentielle, commente l’ONG dans son rapport.
«L’usage de lois répressives pour écraser le droit à la liberté d’expression se traduit par la détention arbitraire de très nombreux citoyens», déclare François Patuel, chercheur sur l’Afrique de l’Ouest à Amnesty International, cité dans le rapport.
Ainsi, fin janvier 2019, le député Alain Lobognon, «inculpé de divulgation de fausses nouvelles et d’incitation à la révolte, a été condamné à un an de prison».
«Au moins 17 détentions arbitraires de journalistes et blogueurs ont été recensées ces cinq dernières années et le Conseil national de la presse a sanctionné des organes de presse à maintes reprises, leur imposant interruptions de publication et lourdes amendes», ciblant «les publications critiques envers les autorités et proches des mouvements d’opposition», estime l’organisation.
De plus, «les réunions pacifiques à l’initiative d’organisations de la société civile et de groupes d’opposition sont régulièrement interdites et dispersées par la police et la gendarmerie, qui font usage d’une force excessive».
Amnesty s’alarme également des conditions carcérales «inhumaines» en Côte d’Ivoire : «152 personnes sont mortes en détention depuis août 2014», selon ses investigations.
«Alors que le président ivoirien Alassane Ouattara s’est engagé à ce que justice soit rendue dans tous les cas de violations des droits humains, seuls les partisans présumés de l’ancien président Laurent Gbagbo ont été jugés pour les graves violations commises pendant et après (la présidentielle) de 2010».
Tandis que des «membres des Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI), fidèles au président Ouattara, soupçonnés de graves violations des droits humains, n’ont pas été traduits en justice. Ils seraient notamment responsables de la mort de plus de 800 personnes à Duékoué (ouest) en avril 2011», déplore Amnesty.