L’option d’une intervention militaire internationale est de plus en plus envisagée mais fait encore débat, notamment chez les voisins maghrébins inquiets des probables conséquences régionales.
La Libye est actuellement un Etat failli, où prospèrent, sur la plaie laissée par l’ablation du régime Kadhafi opérée par l’Otan en 2011, les miasmes des milices et de la guerre civile.
Sur cette gangrène s’est enkysté le mal absolu, Daech qui s’est implanté fin 2014 à Derna, puis en février 2015 à Syrte, et menace de s’étendre à son voisinage africain et de semer la terreur dans une Europe distante d’à peine 300 km. Au chevet du malade, le collège de l’ONU tente tous les remèdes, et les frères arabes s’épuisent en médiations, vaines jusqu’à présent.
Après divers espoirs déçus, la formation d’un gouvernement d’union nationale entre les autorités rivales de Tobrouk et de Tripoli était annoncée à Skhirat, au Maroc, le 14 février, laissant entrevoir une rémission qui permettrait à l’État ranimé de se débarrasser de la plus inquiétante métastase africaine du pseudo-califat. Sa confirmation, qui devait avoir lieu le 16 février, a été repoussée au 23 février par le Parlement de Tobrouk, reconnu internationalement, et reste loin de faire l’unanimité à Tripoli, la capitale tenue par une coalition de milices dominée par les islamistes de Fajr Libya.
Pour sauver la Libye, l’alliance euro-américaine se propose de mener des frappes dites chirurgicales, qu’elle croit depuis vingt ans, susceptibles de réordonner positivement le monde arabe. Mais cette option jette les capitales d’Afrique du Nord dans un effroi presque aussi grand que celui qu’inspire Daech. Le 16 février, le ministre tunisien de la Santé annonçait déjà «un plan d’urgence, afin de se préparer à l’afflux sur le sol tunisien des réfugiés et de migrants fuyant les frappes aériennes qui pourraient s’abattre sur la Libye».
Confirmant les sources anonymes du ministère français de la Défense, qui proclamait fin décembre que, « pour éradiquer le « cancer Daech » et ses métastases libyennes, une action militaire est jugée indispensable à l’horizon de six mois, voire avant le printemps », le chef de l’état-major américain déclarait le 22 janvier étudier avec son homologue français la perspective d’une « action militaire décisive contre Daech » en Libye.
Le chef de l’opposition travailliste en Grande Bretagne enjoignait au Premier ministre, David Cameron de s’engager à consulter le Parlement « avant de renouveler quelque opération militaire que ce soit en Libye ». Rome, l’ancienne métropole de la colonie libyenne, dont l’île de Lampedusa constitue pour les immigrés, un tremplin entre Syrte et l’Europe, se dit prête à prendre la direction des opérations militaires, alors que la France, commandant en chef des bombardements de 2011, est aujourd’hui dispersée sur les fronts syro-irakien, sahélien et centrafricain.