Le Sierra Leone est désormais le théâtre de la question éthique qui se pose depuis le lancement des biocarburants. La société suisse Addax Bioenergy a acquis une surface de 10.000 hectares dans la région de Makeni pour une exploitation qui durera 50 ans. L’objectif de la compagnie est de produire, à partir des cannes à sucre, près de 90.000 m3 de bioéthanol chaque année. Ce carburant sera principalement destiné au marché de l’Union Européenne. Dès les préparatifs du lancement de ce projet il y a 5 ans, plusieurs ONG criaient déjà au scandale. En sachant que le pays n’a pas encore résolu la question de la sécurité alimentaire sur son territoire, les détracteurs du projet signalent que la surface agricole concernée par l’exploitation est l’équivalent de près de 200 exploitations agricoles dans un pays développé tel que la France. Cependant, la compagnie genevoise avait inclus des mécanismes environnementaux et sociaux comme paratonnerre contre la foudre des ONG. En effet, le projet intègre la construction d’une centrale électrique à biomasse qui devrait alimenter à hauteur de 20% le réseau national, la mise en place du projet devrait créer près de 2000 emplois pour les autochtones. Lors de sa promotion, le groupe suisse présentait le projet comme s’inscrivant dans le cadre du développement durable, en associant agriculture et énergie. Les raisons avancées par les ONG sont multiples, pour certains, il est inconcevable de cultiver massivement des aliments pour les réservoirs alors que juste à coté, il y a encore des assiettes vide, sans compter que ces carburants ne sont même pas destiné au marché local. Pour d’autres, l’implantation d’Adax Energy n’a même pas respecté les prémices de base à l’instar du consentement libre, préalable et informé des communautés. Aussi, la compagnie ne tiendrait même pas ses promesses, au risque de mettre en péril la sécurité alimentaire.
Selon les ONG qui sont sur place, 13.000 personnes vivraient sur les terres allouées à Addax et ce dernier avait promis de ne pas cultiver les cannes à sucre sur les terres les plus fertiles, réservées aux rizières. L’espace des terres agricoles réservées à la production des biocarburants ne fait qu’augmenter à raison de 10 millions d’hectares chaque année, des observateurs tirent la sonnette d’alarme et demande une régulation du secteur.